Depuis le printemps 2021, une quinzaine d’enseignantes et d’enseignants formés par le Centre LEARN de l'EPFL se rendent dans les écoles du canton de Vaud pour initier leurs pairs du 1er cycle primaire à l’éducation numérique. L’objectif du Canton est de former les élèves à celle-ci dès le début de leur scolarité.
Dans la salle de sciences du collège du Cheminet à Penthalaz, des petits groupes d’enseignantes du premier cycle primaire (1P-4P), iPad à la main, enregistrent une chanson, créent un gif, un QR code, prennent des photos ou tentent de faire une capture vidéo de leur écran. Une classe dissipée ? Au contraire, très appliquée. Au printemps, ces enseignantes étaient de retour sur les bancs d’école pour la première après-midi de six journées de formation dédiées à l’éducation numérique.
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Le Département vaudois de la formation, de la jeunesse et de la culture (DFJC), a l’objectif de former d’ici 2023 tout le corps enseignant vaudois des cycles primaires à l’éducation numérique, afin de l’intégrer au cursus des élèves dès leur entrée à l’école. Il mène ce projet novateur en partenariat avec la HEP Vaud, l’UNIL et l’EPFL via le Centre LEARN.
Ce dernier a formé entre 2018 et 2019 quelque 350 enseignantes et enseignants de dix établissements pilotes à la science informatique. En 2020, le Centre LEARN a procédé à un passage de flambeau, en recrutant parmi ces participantes et participants une quinzaine de personnes, et en les formant pour transmettre leur savoir à leurs pairs.
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«Nous avons choisi une équipe hétérogène et complémentaire. Durant six mois, nous nous sommes rencontrés une fois par semaine, adaptant la formation aux besoins et aux retours d’expériences, tout en privilégiant les manipulations. Nous allons poursuivre les échanges durant cette nouvelle année scolaire», notent Frédérique Chessel-Lazzarotto et Grégory Liégeois, chefs de projet au Centre LEARN et responsables de la formation continue du corps enseignant.
Au printemps 2021, la petite équipe d’enseignantes et d’enseignants formateurs a commencé son travail sur le terrain. Première étape, s’assurer que tout le monde ait les mêmes bases, en sachant prendre en main une tablette, utiliser ses différentes fonctionnalités et créer «un livre multimédia» comprenant du texte, des images, de la vidéo et du son.
A l’établissement primaire Penthalaz-Venoge, la dizaine de participantes n’avait en effet pas les mêmes connaissances de base et seule une minorité d’entre elles avait déjà eu recours à des outils numériques en classe.
«La formation n’est qu’à ses débuts, mais elle est très bien reçue, on constate de l’intérêt et de l’implication», remarque Chantal Vial, enseignante au collège de Chernex, et faisant partie de l’équipe recrutée par le Centre LEARN.
Une étude menée auprès des 350 enseignantes et enseignants formés par le Centre LEARN à la science informatique et à la pensée computationnelle a d’ailleurs montré un très bon taux d’adoption des activités proposées. En Avril 2019, 97% des répondants avaient effectué avec leurs élèves au moins une des activités proposées. Ce taux était toujours de 80% en Mars 2020. Les activités débranchées ayant particulièrement la cote auprès du corps enseignant du cycle1.
Le programme de la formation à l’éducation numérique s’articule en trois axes: la citoyenneté numérique, la science informatique et les technologies de l’information et de la communication. «Nous devons développer l’esprit critique des élèves, les amener à interroger les technologies et à comprendre comment elles fonctionnent. Leur montrer que l’homme a le pouvoir sur celles-ci, que tout est une question de choix», soulignent Frédérique Chessel-Lazzarotto et Grégory Liégeois, qui ont exercé comme enseignants avant de rejoindre le Centre LEARN.
Des activités débranchées comme le « Jeu de la grue », où les élèves doivent déplacer un cube et effectuer à chaque étape un choix technique, ou « Pixel-Paravent » qui les initie à l’écriture binaire, permettent de poser les bases de la culture numérique. Par la suite, interviennent des activités avec une tablette, un ordinateur, les robots Thymio ou Blue-Bot. «Le but est d’encourager d’autres modèles d’utilisation de ces outils, de stimuler la créativité», explique Frédérique Chessel-Lazzarotto. Dès l’âge de cinq ans, les élèves sont par exemple invités à réaliser un film d’animation en stop-motion. «Ils prennent alors conscience qu’on peut jouer avec les images, qu’il n’y a pas de magie derrière», sourit Grégory Liégeois.
Le Centre LEARN a aussi collaboré à la création de la série d’histoires d’Oscar & Zoé. Des ouvrages destinés à aborder le thème de la citoyenneté numérique avec les enfants. «Autour de l’histoire des ‘bestioles de l’ombre’ d’Allison Ochs, qui traite de la peur que peut susciter un contenu numérique, des images qui peuvent choquer, on peut proposer aux enfants un safari photos où ils partent avec l’iPad photographier des «bestioles» qui leur font peur et ensuite les inviter à les transformer. Cela permet également d’avoir des discussions plus philosophiques autour des émotions, des divergences d’opinions ou encore du consentement», détaille Frédérique Chessel-Lazzarotto.
Le déploiement du projet éducation numérique auprès de tous les enseignants et enseignantes vaudoises des deux cycles primaires s’échelonnera normalement sur deux ans. Le Centre LEARN a commencé en 2019 la formation du corps enseignant du cycle 2 appartenant aux dix établissements pilotes, et dès la rentrée 2022, le projet se déploiera dans tous les établissements scolaires sur le même modèle que pour le cycle 1. Outre les journées de formation, le Canton de Vaud a également financé l’achat de matériel, avec notamment l’objectif d’équiper chaque classe de robots Thymio (dès la 3P) et Blue-Bot (1-4P), et d’une valise de 5 iPads (3-4P).
Le manuel «Décodage», fruit d’une collaboration entre le Canton de Vaud, l’EPFL, la HEP Vaud, l’UNIL et des experts externes au projet, servira aussi d’appui au corps enseignant. «Il regroupe des activités branchées et débranchées ainsi que des scénarios pédagogiques qui permettent de développer la culture et la citoyenneté numérique des élèves dès 4 ans», explique Frédérique Chessel-Lazzarotto. L’expérience montre en effet que le soutien, le matériel, comme le temps à disposition, constituent des composantes essentielles pour le succès du projet sur le long terme.
Crédit: Article adapté d’une publication originale sur le site de l’EPFL, les textes, les images et les vidéos sont sous licence CC BY-SA 4.0